L'insécurité en Guyane
Le 4 février 2011, sur Vivre en Guyane

Attention, sujet chaud, brûlant même si l'on en croit les polémiques qui fusent de toutes part sur les forum de voyage ! Car le département traîne une sale réputation en matière de sécurité des personnes et des biens... La Guyane est-elle donc suffisamment sûre au quotidien pour y vivre sereinement et, tant qu'à faire, en famille avec des enfants ? En général, oui. En particulier, ça dépend des endroits ! Une petite (et sans doute attendue) mise au point s'impose...

 

Le fléau de l'orpaillage

 

L'orpaillage (clandestin) est la principale source d'insécurité et de criminalité en Guyane. Il est pratiqué par des garimpeiros sans scrupules, pour l'essentiel des Brésiliens sans papiers venus chercher fortune en Guyane et prêts à tout car ils n'ont pas grand chose à perdre (sauf la vie). Corollaire évident : il peut être dangereux de traîner en forêt dans les zones reculées et les petites criques isolées en secteur aurifère (à l'intérieur des terres). En cas de mauvaise rencontre dans ce contexte, il est préférable de ne pas opposer de résistance et de donner ce qu'ils réclament (en général "dinheiro" = "argent" en Brésilien). Ces gens là ne plaisantent pas et sont armés...

 

Un exemple, tiré d'un fait divers retentissant qui a défrayé la chronique en 2006 (le procès devrait s'ouvrir prochainement) : l'assassinat de deux gardes-animateurs forestiers, tués par balle par deux orpailleurs brésiliens dans la réserve naturelle des Nouragues (à une centaine de kilomètres de Cayenne, en pleine forêt amazonienne). Ce double meurtre a été commis non loin de la station de recherche du CNRS, laquelle avait été attaquée en 2004 par des orpailleurs pour voler du matériel. Elle est désormais protégée par des gardes engagés par le CNRS...

 

Ceci étant dit, l'orpaillage illégal (et la criminalité associée) régresse nettement en Guyane depuis le lancement de l'opération "Anaconda", en 2002. C'est le nom de code (pour ne pas dire "de guerre") d'un programme d'éradication de l'orpaillage clandestin mis en place par la gendarmerie (opérations héliportées, destruction du matériel d'orpaillage et des moyens de ravitaillement). Inutile de préciser que le dispositif Anaconda a été considérablement renforcé depuis 2006, suite à l'émoi suscité par le double assassinat des Nouragues : l'armée et les douanes française apportent désormais leur concours (février 2008), sous le nom de code "Harpie", avec de très gros moyens (repérage des camps d'orpaillage par satellite, opérations de type commando, appui aérien)...

 

Bref, l'or en Guyane est un sujet d'une importance telle qu'il mérite au moins un article dédié. J'aurai donc l'occasion d'y revenir plus en détail une prochaine fois. 

 

En ville et sur route

 

En dehors du cas particulier des secteurs aurifères, l'insécurité est surtout nocturne (comme partout, y compris en Métropole). Il faut donc éviter de tenter le diable en se promenant (surtout seul) de nuit. Une précaution qui relève du simple bon sens et  vaut particulièrement dans les lieux réputés infréquentables aux heures sombres :

 

♦  quartier "la Crique" à Cayenne (encore appelé "Chicago" !), où se tient de jour  le marché (pour le coup dans une bonne ambiance, chaleureuse, colorée, familiale et sans danger !) ;

 

♦  Maripasoula (surnommé "le far-ouest" guyanais), en raison de la proximité avec la frontière du Surinam et de nombreux sites d'orpaillage (forte présence de clandestins en provenance de la forêt et fréquents règlements de compte entre aventuriers et illégaux venant du Brésil ou du Surinam, dixit le Conseil Général de Guyane) ;

 

♦  St Georges de l'Oyapock et, plus généralement, la route à partir de Régina en direction de la frontière brésilienne (car-jacking et embuscades organisés par des clandestins cachés dans la forêt : situation en voie d'amélioration en raison de la prochaine inauguration du Pont du Brésil et des contrôles renforcés de la gendarmerie et de la police de l'air et des frontières - PAF pour les intimes) ;

 

♦  les bidonvilles (appelés "zones d'habitat informel" ou "zones d'habitat spontané" par l'administration), généralement localisés en périphérie des agglomérations (à éviter aussi de jour, mais c'est une évidence !), et les squats en zone urbaine (présence de bâtiments délabrés dans le centre ville de Cayenne). Les plus dangereux (source : gendarmerie) sont les ressortissants de "Georgetown" (= Guyana, pays proche désigné en Guyane par le nom de sa capitale pour éviter tout malentendu, la phonétique étant proche) : la vie humaine n'a aucune importance à leurs yeux... Peu de risques cependant, car ils s'entretuent dans des règlements de comptes fratricides, sans rapport direct avec la population générale...

 

♦  d'une manière générale, prudence dans les zones frontalières, le long du Maroni et de l'Oyapok (nombreux clandestins). En cas de braquage, encore une fois, pas d'héroïsme déplacé ! Laisser la voiture, l'argent ou les effets personnels dans le calme et sans agressivité... Les illégaux ne sont pas spécialement dangereux s'ils ne se sentent pas menacés (récits rapportés).

 

Sécurité passive

 

Encore une fois, et sans se cloîter dans un coffre-fort, il est facile d'éviter les ennuis en Guyane. C'est essentiellement une question de bon sens et de prudence élémentaire. Exactement comme en Métropole : pas plus, pas moins. Par exemple, il ne viendrait à l'idée de personne de déambuler nuitamment dans les cités du "9/3" ou de se hasarder dans les méandres du métro ou du RER parisien, surtout en arborant un luxe ostentatoire. Ici, c'est pareil : il suffit d'éviter les endroits "craignos" et de s'abstenir d'étaler ses richesses.

 

Au quotidien, ne pas oublier de fermer sa voiture à clé et surtout, ne laisser aucun objet de valeur (ordinateur, console de jeu...) à l'intérieur (même caché, on peut être vu). A la maison, idem : fermer toutes les portes et fenêtres donnant sur l'extérieur la nuit (comme en région parisienne !). Les cambriolages sont monnaie courante en Guyane, mais quelques précautions permettent de limiter les risques.

 

D'abord, bien choisir son quartier, calme et résidentiel de préférence. Ensuite, opter pour un logement sécurisé, c'est-à-dire sur un terrain clos et équipé de grilles de métal forgé sur les ouvertures (idéal pour éviter les effractions). Pour une maison, un ou deux chiens de taille respectable (un yorkshire ou un bouldedoque français ne sont pas très crédibles) dans le jardin sont bienvenus, car dissuasifs. Toujours pour une maison, vérifier que la toiture n'est pas accessible (ie descend trop bas), car les intrus passent parfois par les toits en ôtant les tôles de couverture (tous les toits sont en tôle en Guyane, à cause des averses torrentielles). Enfin, le must pour ceux qui peuvent se le permettre (et si les effets personnels le justifient) : une alarme électronique. Finalement, rien de très dépaysant par rapport à la région parisienne, par exemple...

 

Dernière précision, pour ceux qui habite(ro)nt sur des sites isolés dans la "campagne" (savane entre Cayenne et Kourou, par exemple)  : les armes sont en vente libre en Guyane. A titre dérogatoire, il n'est pas nécessaire de détenir un permis de chasse pour acquérir un fusil. Il suffit de se rendre dans une armurerie (assez nombreuses en Guyane et barricadées comme des banques). En conséquence, nombreux sont les habitants armés dans les lieux reculés...

 

En conclusion 

 

Pas d'angélisme, mais pas de paranoïa non plus ! La Guyane est loin d'être un coupe-gorge pour sa population. C'est, en revanche, une affectation assez difficile pour les gendarmes et les militaires, qui sont parfois des détracteurs acharnés de la Guyane : leur réalité quotidienne (orpaillage illégal, squats et bidonvilles, clandestins, règlements de comptes, criminalité nocturne) et la vision qui en découle ne sont pas celles du citoyen lambda... 

 

Certes, je ne suis pas en Guyane depuis très longtemps et n'ai peut-être pas (encore) assez baroudé pour en percevoir tous les dangers. Ceci dit, je suis persuadée que tout un chacun est à même de percevoir  les situations "risquées" et de se forger rapidement une opinion sur la sécurité ou l'insécurité ambiantes. Et jusqu'ici, je n'ai jamais eu l'impression d'être en danger en Guyane.

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